Pourquoi avoir créé Tomorrow Theory ?

Jeremy Lamri
12 min readNov 28, 2024

J’ai toujours observé le monde avec un mélange de fascination et d’inquiétude. Je fais partie de notre époque, celle où les progrès technologiques vont de pair avec des crises sociales et écologiques sans précédent. Et je m’y suis forgé une conviction : si nous ne transformons pas radicalement notre manière de concevoir la société et l’économie, les scénarios les plus sombres risquent de se concrétiser. Dans cet article, je souhaite partager la genèse de Tomorrow Theory, et expliquer pourquoi cette initiative est une réponse à l’urgence de préparer les organisations à une économie quaternaire.

I — Les observations fondatrices : entre émerveillement et désillusion

Enfant, comme beaucoup de ma génération, j’ai grandi en regardant des films, en lisant des livres, et en jouant à des jeux vidéo qui projetaient des visions variées du futur. Ces références de la pop culture n’étaient pas que du divertissement ; elles étaient aussi des miroirs de nos espoirs et de nos craintes. Prenons Star Trek, qui dépeint un avenir où la technologie est mise au service de l’exploration et de la collaboration intergalactique, dans une société sans argent et guidée par le savoir. Cette vision optimiste m’a toujours fasciné.

Mais à mesure que je regardais d’autres œuvres, comme Blade Runner ou Terminator, j’ai découvert des dystopies technologiques où les IA dominent ou l’humanité survit à peine sous un ciel de néons et de cendres. Ces deux extrêmes m’ont appris une chose essentielle : le futur n’est pas figé, il dépend des choix que nous faisons aujourd’hui. Même dans les jeux vidéo comme SimCity ou Civilization, la gestion des ressources et des conflits montrait déjà la complexité de bâtir un monde équilibré. J’ai réalisé très jeune que si nous ne tenons pas compte des interactions entre l’humain, la technologie et la nature, le système s’effondre.

Au-delà de ces éléments culturels, j’ai été directement témoin des promesses et des limites du progrès. D’un côté, la technologie ouvrait des possibilités infinies : Internet bouleversait les communications, et la mondialisation semblait rapprocher les peuples. Mais de l’autre côté, les fractures sociales s’aggravaient, et l’empreinte écologique des activités humaines devenait une préoccupation croissante. Ces contradictions m’ont marqué : comment pouvait-on générer autant de richesse tout en laissant une partie de l’humanité à la marge ? Pourquoi les innovations, pourtant porteuses d’espoir, exacerbaient-elles parfois les inégalités ?

Les crises du monde réel sont venues confirmer ces intuitions forgées par la fiction. Dans Wall-E, les humains, réduits à des consommateurs passifs sur une Terre ravagée, reflétaient de façon presque caricaturale l’impact de nos modes de vie. En parallèle, les crises que j’ai observées — la bulle Internet des années 2000, la crise financière de 2008, et les catastrophes climatiques comme les ouragans ou les feux de forêt — m’ont montré que ces scénarios dystopiques n’étaient pas si éloignés de la réalité.

Pendant la crise des subprimes de 2008, alors que les marchés financiers s’effondraient, j’ai observé comment des millions de vies avaient été affectées par des décisions prises dans des tours d’ivoire. La promesse de “la main invisible du marché”, un concept souvent cité mais rarement compris, ressemblait davantage à un mythe.

Ainsi, en grandissant, j’ai compris que notre époque ressemble à un carrefour où coexistent ces deux futurs : celui de Star Trek, porté par la connaissance et la solidarité, et celui de Blade Runner, dominé par des intérêts à court terme et des déséquilibres systémiques. Ces contrastes ont nourri en moi une question essentielle : quelles décisions devons-nous prendre aujourd’hui pour marcher sur la ligne de crête entre ces scénarios opposés ?

C’est à cette question que j’ai choisi de dédier ma carrière, pour trouver et mettre en oeuvre les réponses qui permettront un vrai retour au progrès.

II — Militer pour un retour au progrès

Pendant longtemps, le mot progrès a été synonyme de promesses. Il incarnait un idéal collectif : l’amélioration continue des conditions de vie, la conquête de nouveaux territoires, la réduction des souffrances humaines. Mais au fil des décennies, ce concept s’est peu à peu dévoyé. Le progrès est devenu synonyme de vitesse, de croissance infinie, et d’innovation technologique parfois vide de sens. Nous avons confondu faire plus avec faire mieux.

Aujourd’hui, cette dérive se heurte à des limites concrètes. La planète crie son épuisement, les sociétés s’effritent sous les inégalités, et la technologie, au lieu d’unir, divise parfois davantage. Il suffit de regarder comment des outils autrefois vus comme révolutionnaires — les réseaux sociaux, par exemple — alimentent désormais la polarisation politique et la désinformation.

Pourtant, le progrès véritable n’est pas mort. Il reste une aspiration profondément ancrée dans l’humanité. Ce qui manque, ce n’est pas la volonté d’avancer, mais une définition renouvelée de ce que signifie progresser. Comment pouvons-nous réinventer ce mot pour qu’il redevienne un moteur d’espoir, au lieu d’être un prétexte à la destruction ?

Dans les récits de la pop culture évoqués précédemment, la technologie est souvent une arme à double tranchant. Elle peut autant sauver que détruire, selon l’usage qu’on en fait. Cette ambivalence est au cœur de notre époque. Jamais l’humanité n’a disposé d’outils aussi puissants : l’intelligence artificielle, les biotechnologies, la robotique. Mais ces avancées soulèvent une question fondamentale : pour quoi faire ?

Le parfait exemple du moment : l’IA. L’optimisme béat autour de ses possibilités — des assistants virtuels à l’automatisation massive — est souvent mis en opposition face à son potentiel destructeur : surveillance accrue, perte d’emplois, manipulation de l’opinion. Pourtant, l’IA n’est ni bonne ni mauvaise en soi. C’est notre capacité à aligner son usage avec des finalités humaines qui en fera une force de progrès ou une menace existentielle.

Nous devons donc redéfinir la place de la technologie dans notre quête de progrès. Elle doit cesser d’être une fin en soi pour devenir un outil au service d’un projet plus grand : celui de renforcer notre humanité, et non de la diluer.

Si le progrès technologique soulève des questions complexes, le progrès humain offre une boussole. Il s’agit de réorienter nos efforts vers ce qui compte vraiment : les relations, l’éducation, la santé, la dignité. Nous devons revenir à une compréhension plus holistique de ce qu’est une société qui progresse. Une société qui ne se contente pas de produire plus ou plus vite, mais qui crée des conditions pour que chacun puisse s’épanouir.

Le philosophe Edgar Morin a écrit : “Le progrès véritable consiste à allier le développement des sciences et des techniques avec celui de la conscience, de l’éthique et de la solidarité.” C’est ce genre de progrès que nous devons viser : un progrès qui prend soin de l’humain tout en respectant les limites de notre environnement. Et au-delà de ma carrière, c’est là qu’est mon chemin de vie, ma raison d’être.

III— Agir avant qu’il ne soit trop tard

Le danger aujourd’hui est de tomber dans le cynisme ou le fatalisme. Face aux crises écologiques, sociales et technologiques, beaucoup s’interrogent : n’est-il pas trop tard ? Pourtant, l’histoire nous enseigne que l’humanité est capable de sursauts. Nous avons déjà surmonté des périodes de chaos en réinventant nos modèles, nos systèmes, et nos valeurs.

La différence aujourd’hui, c’est que nous n’avons plus le luxe du temps. Chaque jour perdu à maintenir le statu quo nous rapproche d’un point de bascule irréversible. Mais ce qui rend ce moment unique, c’est que nous avons tous les outils nécessaires pour inverser la trajectoire : des connaissances scientifiques aux technologies innovantes, en passant par une prise de conscience collective grandissante.

Je pense sincèrement que ces outils ne suffiront qu’à la condition que nous retrouvions une vision commune du progrès. Un progrès qui ne laisse personne de côté, qui respecte les limites planétaires, et qui donne à chacun une place dans la construction de l’avenir.

C’est dans cette optique qu’avec un groupe de personnes aux valeurs communes, nous avons créé Tomorrow Theory. Ce n’est pas simplement un studio d’innovation RH, mais un projet de transformation globale. Sa mission est d’aider les organisations à réintégrer le progrès humain dans leurs priorités, en montrant que performance économique et impact positif ne sont pas incompatibles.

En réconciliant technologie et humanité, efficacité et solidarité, Tomorrow Theory veut démontrer qu’un retour au progrès est possible. Mais ce retour nécessite une action collective : il ne s’agit pas d’un chemin qu’on peut parcourir seul, mais d’un effort commun pour redéfinir ce que signifie véritablement avancer. Ainsi, le progrès n’est pas une idée du passé. C’est une idée à réinventer pour qu’elle redevienne un phare dans l’obscurité de nos incertitudes.

IV — L’économie quaternaire : un modèle pour un avenir soutenable

L’économie quaternaire n’est pas un concept nouveau, mais une évolution naturelle des précédents modèles économiques. Après les économies agricole, industrielle et tertiaire, elle propose une vision fondée sur les valeurs intangibles : les connaissances, les compétences, la solidarité, et la durabilité. Ce modèle ne se concentre pas sur la production ou la consommation, mais sur la création de valeur systémique, celle qui bénéficie simultanément à l’individu, à la société et à la planète.

Ce paradigme repose sur l’idée que la richesse de demain ne sera pas mesurée uniquement en termes financiers, mais aussi par des indicateurs comme le bien-être, la résilience des écosystèmes, et la capacité d’innovation collective. À travers cette vision, il devient possible de réconcilier la prospérité économique avec les défis planétaires.

Le modèle économique actuel, basé sur l’extraction de ressources et la maximisation des profits à court terme, est insoutenable. Les signes sont visibles partout : inégalités croissantes, effondrement des écosystèmes, et déconnexion croissante entre les individus et leurs environnements. L’économie quaternaire, en intégrant des valeurs humaines et écologiques, offre une alternative capable de répondre à ces défis.

Elle ne cherche pas à supprimer les bénéfices de l’innovation ou de la performance économique, mais à les redéfinir. Par exemple :

  • Une entreprise quaternaire peut être rentable tout en adoptant une logique de neutralité carbone.
  • Un individu peut être “productif” en contribuant à des projets sociétaux, même en dehors du cadre traditionnel de l’emploi.
  • Une organisation peut innover tout en respectant les cycles naturels et en favorisant l’économie circulaire.

Plus qu’une vision théorique, l’économie quaternaire est une invitation à l’action. Elle montre qu’il est possible de bâtir un futur où la performance économique, l’équité sociale et la durabilité environnementale se renforcent mutuellement. Mais pour que ce modèle prospère, il faut des leaders, des entreprises et des citoyens prêts à abandonner les paradigmes du passé pour embrasser cette transition.

C’est précisément pour répondre à cette nécessité que j’ai créé Tomorrow Theory. Ce studio d’innovation RH n’est pas seulement une entreprise ; c’est une plateforme pour imaginer, tester et déployer les pratiques qui feront de l’économie quaternaire une réalité tangible.

V — Tomorrow Theory : un laboratoire pour préparer les organisations au futur

Lorsque nous avons fondé Tomorrow Theory, notre intention n’était pas simplement de proposer des outils ou des solutions RH. Nous voulions créer un espace où les organisations pourraient repenser leurs modèles pour répondre aux défis du 21ème siècle. La complexité croissante du monde exige des approches nouvelles, et Tomorrow Theory se positionne comme un laboratoire où cette complexité peut être décryptée, apprivoisée et transformée en opportunités.

Pour accompagner les organisations dans leur transition vers un avenir quaternaire, Tomorrow Theory s’appuie sur quatre piliers stratégiques. Ces axes ne sont pas seulement des domaines d’intervention : ils sont conçus comme des leviers pour transformer en profondeur les mentalités, les pratiques, et les modèles économiques.

Acculturation : préparer les esprits et les organisations

Le premier pilier consiste à sensibiliser, former et engager les leaders et les équipes autour des grands enjeux du futur. L’acculturation est indispensable pour aligner les visions internes et créer une base commune de compréhension et d’action. Chez Tomorrow Theory, cela passe par :

  • Des conférences inspirantes pour éveiller les consciences sur les transformations en cours, qu’elles soient technologiques, sociétales ou économiques.
  • Des ateliers immersifs pour explorer des concepts comme l’économie quaternaire, les soft skills, ou encore la contribution sociétale.
  • Une approche adaptée à chaque organisation, avec des outils pédagogiques innovants pour rendre les idées accessibles et applicables.

L’objectif est de rendre chaque acteur — du collaborateur au dirigeant — capable de comprendre et d’agir face à la complexité.

Études et prospective : éclairer les chemins possibles

Anticiper l’avenir est essentiel pour éviter l’improvisation et prendre des décisions éclairées. ChezTomorrow Theory, nous menons des études approfondies et des exercices de prospective pour analyser les tendances qui redéfiniront les métiers, les compétences et les modèles économiques. Ce pilier inclut :

  • Des cartographies des transformations : identifier les forces à l’œuvre, des technologies émergentes aux dynamiques sociétales.
  • Des scénarios du futur : élaborer des scénarios prospectifs pour projeter les organisations dans des futurs possibles et préparer des réponses adaptées.
  • Des évolutions des métiers et compétences : explorer les écarts entre les compétences actuelles et celles requises pour naviguer dans un monde toujours plus VUCA et BANI.

Ces analyses ne sont pas des exercices théoriques. Elles fournissent des recommandations concrètes pour orienter les stratégies organisationnelles, pour mieux recruter, développer ou fidéliser les talents de demain.

Ingénierie : construire des solutions sur mesure

Une vision ne devient opérationnelle qu’à travers des outils et des approches concrètes. Le pilier de l’ingénierie vise à transformer les idées en solutions adaptées aux réalités des organisations. Cela comprend :

  • L’ingénierie des compétences, pour développer des méthodologies pour identifier, évaluer et renforcer les compétences clés, qu’elles soient techniques, comportementales ou cognitives.
  • La conception de modèles contributifs, pour aider les organisations à intégrer des logiques apprenantes et contributives dans leurs structures.
  • La création de parcours personnalisés, pour proposer des dispositifs de développement adaptés à chaque collaborateur, en s’appuyant sur des données précises et des outils technologiques avancés.

Avec l’ingénierie, Tomorrow Theory traduit des concepts ambitieux en dispositifs pratiques, capables de transformer durablement les pratiques organisationnelles.

Recherche et développement : explorer et innover

Enfin, le pilier de la recherche et du développement est au cœur de l’identité de Tomorrow Theory. Il s’agit d’explorer les frontières du savoir et de l’innovation pour rester à l’avant-garde des transformations en cours. Ce travail inclut :

  • La création de cadres conceptuels, comme par exemple décomposer les compétences en sous-facteurs pour mieux les comprendre et les développer.
  • L’expérimentation de nouvelles approches, pour tester des outils ou des modèles novateurs, comme l’usage de l’IA dans la gestion des talents ou les méthodologies pour développer les soft skills.
  • La collaboration avec des partenaires académiques et industriels, pour assurer un croisement entre rigueur scientifique et applicabilité concrète.

Ce pilier garantit que les solutions proposées par Tomorrow Theory s’appuient sur des connaissances solides, tout en étant tournées vers l’innovation.

Conclusion

Depuis mon enfance, où je découvrais les visions futuristes de la pop culture et observais les contrastes saisissants du monde qui m’entourait, une question essentielle m’a toujours habité : quel futur voulons-nous construire ? Cette question est devenue un fil conducteur, une boussole qui a guidé mon parcours personnel et professionnel, jusqu’à ce que nous donnions naissance à Tomorrow Theory.

Aujourd’hui, cette question est plus pertinente que jamais. Les choix que nous faisons collectivement détermineront si nous nous dirigeons vers un avenir de fractures, à la manière des dystopies technologiques que nous redoutons, ou vers une société où la connaissance, les compétences, la solidarité et la durabilité deviennent les piliers d’un progrès véritable.

Avec Tomorrow Theory, nous ne cherchons pas à apporter toutes les réponses. Notre projet est une invitation : une plateforme pour explorer, expérimenter et co-construire des solutions adaptées aux défis de notre époque. Les quatre piliers d’action que nous avons développés — acculturation, études et prospective, ingénierie et recherche — reflètent cette ambition de préparer les organisations à un futur où l’économie quaternaire ne sera pas une utopie lointaine, mais une réalité tangible.

Revenir au progrès, tel que nous le défendons, c’est retrouver le sens d’une quête collective. C’est réconcilier l’innovation avec l’humain, la performance avec la planète, et l’individu avec la société. Ce progrès-là ne se décrète pas : il se construit, pas à pas, par des choix éclairés et courageux.

Nous sommes convaincus que Tomorrow Theory n’est qu’un début. Une boussole, une impulsion, un espace de réflexion et d’action. Mais il appartient à chacun, organisations et individus, de tracer son propre chemin sur cette ligne de crête entre dystopie et utopie. Le futur est une responsabilité partagée, et chaque décision compte.

En bouclant cette boucle, nous vous invitons à rêver, mais surtout à agir. Bien sûr, l’histoire de la création de Tomorrow Theory est bien plus complexe que cette épiphanie, mais petit à petit, tout prend son sens, et c’était inéluctable sur notre chemin. Car le futur que nous voulons construire ne naîtra pas tout seul : il dépend de nous tous, ici et maintenant.

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Jeremy Lamri
Jeremy Lamri

Written by Jeremy Lamri

CEO @Tomorrow Theory. Entrepreneur, PhD Psychology, Author & Teacher about #FutureOfWork. Find me on https://linktr.ee/jeremylamri

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