Le prompting des IA : un faux problème

Jeremy Lamri
9 min readJul 22, 2023

[Article rédigé le 2juin 2023, par Jeremy Lamri avec le support de l’algorithme Open AI GPT-4 pour environ 10%. Images créées avec DALL-E 2 Experimental, tous droits réservés, 2023].

Dans les mois qui viennent, les intelligences artificielles (IA) génératives vont jouer un rôle croissant dans la communication et l’aide à la réflexion. Cependant, cette réalité est loin d’être inoffensive : elle s’accompagne de certaines inégalités dans la capacité des utilisateurs à prompter efficacement ces IA. Plusieurs facteurs contribuent à ces inégalités, tels que l’accès aux outils, les compétences linguistiques, culturelles et technologiques. À une époque où la technologie est censée être le moteur de la démocratisation des connaissances et des compétences, il est crucial de comprendre et de surmonter ces inégalités.

Les progrès rapides de l’intelligence artificielle et du traitement du langage naturel (NLP pour Natural Language Processing, en anglais) offrent de nouvelles perspectives et opportunités pour résoudre ce problème. En effet, en améliorant les systèmes de communication homme-machine, ces innovations pourraient non seulement faciliter l’utilisation des IA génératives, mais aussi réduire les inégalités entre les différents groupes d’utilisateurs.

Qu’est ce que le prompting ?

Avant de plonger dans le coeur du sujet, il convient de commencer par définir le terme “prompting”. Le prompting, dans le contexte de l’intelligence artificielle et de la communication avec les machines, fait référence à l’action d’amorcer, de guider ou d’activer une réponse de la part d’une IA générative.

Une IA générative se caractérise par sa capacité à comprendre et à produire des contenus textuels, audio ou visuels, souvent basés sur des exemples de données passées. Les utilisateurs interagissent avec ces systèmes en leur fournissant des instructions, des questions ou des indications — appelées “prompts” — qui aident l’IA à générer des réponses ou des créations pertinentes et cohérentes. L’exemple typique est l’utilisation de ChatGPT, où les requêtes textuelles sont ces fameux prompts.

En d’autres termes, le prompting est le processus par lequel un utilisateur communique avec une IA générative en lui envoyant des messages, des demandes d’informations ou d’actions, pour obtenir la réponse ou l’aide désirée. Il est clair que la manière de prompter détermine directement la qualité de la réponse.

En effet, il faut savoir qu’une IA telle que ChatGPT ne répond pas réellement à vos questions, mais se contente de prédire les mots les plus probables suite à votre requête, puis les suivants, puis les suivants jusqu’à faire des phrases complètes. Un peu comme sur Microsoft Word ou sur certains smartphones, qui proposent la suite de la phrase que vous êtes en train d’écrire.

Autrement dit, plus le prompt est précis et pose un contexte clair, plus il sera facile pour l’IA de prédire des mots et des phrases adaptés à la demande, à partir de sa large base de connaissances. Au-delà de la qualité de l’algorithme et de ses données d’entrainement, la qualité de la réponse générée tient donc directement aux aptitudes des utilisateurs à formuler des prompts clairs et efficaces et à naviguer dans l’interaction avec les IA génératives. La capacité à prompter serait donc un facteur d’inégalités majeur, puisque tout le monde n’a pas la même capacité à formuler une requête.

Les inégalités actuelles en matière de capacité à prompter les IA génératives

Les inégalités en matière de capacité à prompter les IA génératives sont un enjeu majeur qui entrave non seulement l’accès équitable à ces innovations, mais également leur adoption et leur démocratisation. Les causes et conséquences de ces inégalités sont multiples.

Aujourd’hui, l’accès aux technologies n’est pas encore universel, notamment en raison de la fracture numérique qui se traduit par un écart entre les populations qui ont facilement accès aux technologies de l’information et à internet et celles qui en sont privées. Il en résulte que certains individus ou groupes sociaux n’ont pas les moyens financiers, les infrastructures ou les connaissances nécessaires pour tirer pleinement profit des IA génératives.

Les IA génératives sont développées en grande partie par des entreprises situées dans des pays industrialisés, mettant souvent en avant leurs propres langues et cultures. Ainsi, certains utilisateurs non familiers de ces langues ou ne partageant pas les mêmes références culturelles peuvent rencontrer des difficultés à prompter ces IA, ce qui peut créer des barrières et des incompréhensions.

Chaque individu possède un niveau de compétence en communication différent, parfois dû à son éducation, sa personnalité ou son expérience professionnelle. Ces variations peuvent entraîner des inégalités en termes de capacité à prompter les IA génératives, accentuant les différences entre les utilisateurs.

Le fossé entre ceux qui peuvent prompter les IA génératives efficacement et ceux qui ne le peuvent pas risque de creuser une nouvelle fracture sociale. Les individus qui maîtrisent ces compétences auront accès à des avantages tels que des emplois mieux rémunérés, des opportunités d’apprentissage et un meilleur épanouissement personnel, tandis que les autres resteront en marge de cette révolution technologique.

Les inégalités dans la capacité à prompter les IA génératives entraînent l’exclusion de certains groupes sociaux, culturels et linguistiques. Ces exclusions peuvent favoriser un renforcement des stéréotypes et discriminations, tout en marginalisant ces groupes dans un monde de plus en plus connecté et dépendant de la technologie.

Les avancées technologiques prometteuses pour une meilleure compréhension des prompts

Les innovations en matière d’intelligence artificielle (IA) et de traitement du langage naturel (TLN) offrent des solutions prometteuses pour améliorer les interactions entre les utilisateurs et les systèmes IA génératifs. Les assistants numériques, tels que Siri, Google Assistant et Alexa, en sont de parfaits exemples. Ces technologies permettent aux utilisateurs de poser des questions et de donner des instructions en utilisant leurs propres mots, ce qui rend la communication plus fluide et accessible pour tous.

De plus, la reconnaissance automatique de la parole (RAP) s’est considérablement améliorée ces dernières années. Les systèmes RAP sont désormais capables de comprendre et de transcrire avec précision un large éventail d’accents et de dialectes. Cette avancée permet de réduire les problèmes de compréhension et de prise en compte des différents styles de communication par les systèmes IA génératifs.

Pour résoudre efficacement les inégalités liées à la capacité de prompter les IA génératives, il est crucial d’adopter des approches interdisciplinaires. Cela signifie associer les compétences et perspectives de la sociologie, la philosophie et les sciences techniques pour mieux comprendre les attentes et les besoins spécifiques des utilisateurs.

Les sociologues, par exemple, peuvent aider à analyser les tendances culturelles et sociales pour concevoir des systèmes plus inclusifs. Les philosophes, quant à eux, peuvent apporter leur expertise en éthique et en logique pour garantir la création d’interactions équitables et justes. Enfin, les ingénieurs et les experts en informatique travaillent à l’élaboration des technologies IA elles-mêmes, en prenant en compte les perspectives des sociologues et des philosophes pour concevoir des systèmes plus adaptés et performants.

Pour que les avancées technologiques en matière de prompting des IA génératives puissent réduire efficacement les inégalités, il est impératif de rendre ces technologies accessibles au plus grand nombre. Plusieurs initiatives sont déjà en cours pour garantir un accès plus démocratique aux outils technologiques, parmi lesquelles :

  • L’abaissement des coûts : Les progrès technologiques et la demande croissante ont conduit à une baisse des prix des appareils intelligents et des services liés à l’IA. Ainsi, de plus en plus de personnes ont la possibilité d’utiliser et de maîtriser ces technologies.
  • La réduction des barrières d’entrée : Des efforts sont également déployés pour rendre les interfaces utilisateur plus simples et conviviales, ce qui facilite l’accès aux technologies, même pour les novices en informatique.
  • La disponibilité des ressources éducatives en ligne : De nombreuses ressources gratuites ou à faible coût sont accessibles en ligne pour aider les utilisateurs à se familiariser avec les nouvelles technologies et à améliorer leurs compétences en matière de prompting.

L’impact positif sur la réduction des inégalités liées au prompting des IA génératives

Les innovations en matière d’intelligence artificielle et de traitement du langage naturel s’appuient sur des approches de plus en plus sophistiquées pour s’adapter aux spécificités des utilisateurs. Ces outils sont désormais capables de mieux analyser et comprendre les prompts, peu importe leur qualité, en tenant compte des variations culturelles, linguistiques et contextuelles.

Par exemple, les algorithmes d’apprentissage profond permettent à ces systèmes d’analyser et d’interpréter les nuances dans les expressions, les jargons et les dialectes régionaux, ce qui facilite une compréhension plus précise des demandes et des intentions des utilisateurs.

Il est essentiel de mettre en place des environnements d’apprentissage inclusifs et accessibles pour permettre aux utilisateurs de maîtriser le prompting des IA génératives. Les programmes de formation et d’éducation doivent être adaptés pour répondre aux besoins des publics diversifiés et prendre en compte les différences culturelles, linguistiques et socioéconomiques.

Par exemple, des formations en ligne gratuites ou à bas coût pourraient être offertes, abordant des thématiques telles que l’utilisation optimale des systèmes de prompting et la meilleure manière de communiquer avec les IA génératives. De plus, l’élaboration de tutoriels et de guides facilement compréhensibles contribue également à rendre l’apprentissage accessible à un public plus large.

En investissant dans le développement de technologies d’intelligence artificielle et de traitement du langage naturel plus avancées et inclusives, on peut contribuer à créer une dynamique sociale et économique plus équitable. Les secteurs liés à la technologie offrent en effet de nombreuses opportunités d’emploi et de croissance pour les groupes marginalisés, en particulier ceux qui ont été exclus en raison de leurs compétences en communication limitées ou de leur accès limité aux technologies de pointe.

De plus, en favorisant l’inclusion et en permettant à un plus grand nombre d’utilisateurs de prompter efficacement les IA génératives, on facilite également l’échange d’idées, l’innovation et la collaboration entre les différentes populations et les différentes communautés culturelles.

Conclusion

Pour mieux comprendre les enjeux derrière le prompting des IA génératives, il faut prendre en compte les progrès dans le domaine de l’intelligence artificielle et du traitement du langage naturel. Grâce à ces avancées, nous avons vu une prolifération d’outils tels que les assistants numériques et la reconnaissance automatique de la parole, qui facilitent grandement la communication avec les machines. Ces technologies n’ont pas seulement pour but d’améliorer notre façon de travailler, mais aussi de créer des liens plus étroits entre les utilisateurs et les IA génératives, en prenant en compte tous les besoins individuels et en offrant des solutions adaptées à chacun.

En nous appuyant sur ces avancées, il est tout à fait concevable que nous arrivions à un avenir où les inégalités liées au prompting des IA génératives soient considérablement réduites, voire inexistantes. Les approches interdisciplinaires qui mêlent sociologie, philosophie et sciences techniques permettent d’être à même de mieux détecter les besoins précis des utilisateurs et de proposer des outils qui répondent à ces attentes, quel que soit leur niveau d’expertise en matière de technologies. De plus, la démocratisation de l’accès aux outils technologiques incite de plus en plus de personnes à prendre part à cette révolution numérique.

L’éducation est un levier essentiel pour permettre une adoption efficace en conscience et en responsabilité à grande échelle, et pour faciliter la compréhension des enjeux qui en découlent. L’apprentissage doit être inclusif et accessible à tous, quel que soit leur milieu social, culturel ou linguistique.

Un futur plus égalitaire en matière de prompting des IA génératives est à notre portée si nous continuons à penser demain avec les codes de demain, plutôt qu’avec nos repères actuels. La technologie évoluera rapidement pour interpréter de la meilleure manière même le plus mauvais des prompts. On doit exiger de toute nouvelle technologie qu’elle permette de résorber les fractures de notre société, plutôt que de les augmenter. Mais d’un autre côté, les avancées technologiques ne pourront pas, à elles seules, résorber les inégalités : et à ce titre, les organisations ont un rôle majeur à jouer en faveur de l’égalité des chances et de l’accessibilité pour tous.

[Article rédigé le 2 juin 2023, par Jeremy Lamri avec le support de l’algorithme Open AI GPT-4 pour environ 10%. Images créées avec DALL-E 2 Experimental, tous droits réservés, 2023].

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Written by Jeremy Lamri

CEO @Tomorrow Theory. Entrepreneur, PhD Psychology, Author & Teacher about #FutureOfWork. Find me on https://linktr.ee/jeremylamri

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